5eme Colloque international jeunes chercheurs en Francophonie (Suite)

Publié le par Gael NDOMBI

fonctions de l’ironie dans La petite fille du réverbère de Calixthe Beyala

 

Moïse Ngolwa

Université Laval

ngolwa.moise.1@ulaval.ca

 

La condition de la femme qui est la problématique essentielle de l’œuvre de Calixthe Beyala s’exprime à travers une rhétorique de l’ironie orientée contre l’homme. En effet, c’est en tant qu’incarnation des rapports hiérarchiques que ce dernier est raillé. Examinant le fonctionnement de l’ironie dans La petite fille du réverbère, nous nous proposons d’abord de montrer que l’ironie est, par rapport à l’acte d’écriture de la romancière camerounaise, un moyen de transgresser certains tabous qui s’accordent avec l’état même du champ littéraire africain au moment de la « prise de parole » par les romancières africaines. Nous soulignerons, ensuite, que l’ironie des personnages féminins présente une attitude défensive, une manière de garder l’estime de soi et d’inverser symboliquement la hiérarchie des rapports sociaux. Enfin, nous montrerons que la misère sociale, la condition de la femme livrée à la prostitution et la poursuite dont le personnage principal est la victime, la poussent à renverser par l’ironie les rapports de forces.

 

 

Quand taire, c’est dire : l’ironie dans L’Enfant noir de Camara Laye

 

Germain Nyada

Université de Bayreuth

germain.nyada@ymail.com

 

L’étude se propose d’analyser les marques de l’ironie dans le récit d’enfance d’Afrique francophone d’avant les indépendances. À partir de L’Enfant noir (1953) de Camara Laye, de tels procédés seront examinés sur la base de la théorie de la mémoire collective de Maurice Halbwachs. La théorie d’Halbwachs sera combinée à celle développée par Alaida et Jan Assmann qui parlent des mémoires culturelle et communicative. L’ironie résulte, telle est notre hypothèse, de l’imprégnation de l’identité individuelle par les structures de l’imaginaire collectif de la communauté à laquelle le moi-narrateur s'identifie. Il s’agira donc, premièrement, de montrer qu’en reproduisant le discours et les clichés coloniaux sur l’Afrique, le narrateur, et à travers lui, sa communauté, se lancent dans une diatribe contre le pouvoir colonial et l’Occident de manière générale en feignant de ne point regarder leurs exactions à l’endroit du continent africain. Deuxièmement, il sera question de mettre en lumière les modalités et les spécificités de l’ironie du récit d’une enfance vécue au carrefour de plusieurs cultures.

 

 

Les Vérités d’une Plume au lendemain des Indépendances en Afrique occidentale dans l’État honteux, La Vie et Demie de Sony Labou Tansi et Les Soleils des indépendances d’Ahmadou Kourouma

 

Abib Sene

Université Gaston Berger de Saint-Louis

senabb2@yahoo.fr

 

Généralement, l’ironie se définit comme étant un acte de langage qui consiste à dire le contraire de ce l’on pense, le fait de se  moquer par raillerie de quelqu’un, d’une pratique culturelle, religieuse, d’une communauté donnée, etc. Elle crée souvent une atmosphère qui suscite le rire et donc l’humour. Dans la littérature post-coloniale en Afrique occidentale, des auteurs comme Sony Labou Tansi et Ahmadou Kourouma ont particularisé leurs écrits par un style ironique qui en dit long sur les désillusions des Africains qui ont vu se briser leurs attentes, leurs rêves  de s’épanouir dans des nations démocratiques et prospères. Des régimes politiques aux allures despotiques, des systèmes économiques aux orientations égocentriques ont phagocyté les espoirs nés des indépendances. Ceci bouleversa les fondamentaux de ce qui restait comme conformisme social après le passage dévastateur de la colonisation. Pour panser le chaos engendré par le « dirigisme » politique, les auteurs cités précédemment ont créé dans leurs mondes fictifs des personnages qui ont recours à l’ironie pour, en détendant l’atmosphère, faire passer des messages, des vérités relatives aux questions socio-politiques qui gangrènent l’Afrique et les Africains.

 

 

Les forces de l’ironie dans

Les chauves-souris de Bernard Nanga

 

Élodie Carine Tang

Université Laval

elodie-carine.tang.1@ulaval.ca

 

L’écriture de la discontinuité qui constitue l’une des principales caractéristiques des textes contemporains, est très marquée dans le roman Les Chauves-souris de Bernard Nanga. Ce roman est déterminé par une forte tension qui engendre une rupture dans la cohésion du texte. Celui-ci se présente comme un univers de conflits, tant sur le plan de la fictionnalité que dans celui de l’esthétique. En effet, l’énonciateur implicite des Chauves-souris exploite une mosaïque de procédés littéraires (hybridité textuelle, parallélisme, paradoxe, interférence…) qui brouillent peut-être la pureté du genre romanesque, mais constitue cependant des instruments très suggestifs de l’ironie et suffisamment révélateurs des frasques et de l’envers du décor de la société du roman.

 

 

Le mythe de l'albinos: de l'ironie à la démythification

 

Serge Tsevi Dodounou

Université de Bayreuth

sergeddn@hotmail.com

 

Définissant le mythe comme un récit racontant une histoire sacrée, relatant un événement qui a eu lieu dans le temps primordial, le temps fabuleux des commencements, Mircea Eliade distingue trois fonctions essentielles : le mythe raconte, ensuite il explique, enfin il révèle. Il y a dans cette définition un certain dynamisme qui se situe au niveau narratif, mais ce dynamisme va parfois bien au-delà du récit. Tout mythe renferme un implicite qui induit un certain comportement concret, le faisant ainsi passer de sa fonction explicative, narrative et révélatrice à une fonction normative. En Afrique, l'albinos a toujours été victime des mythes qui l'entourent, et mis, par ce fait, à l’index de la société. Dès sa naissance, l'albinos est stigmatisé. Soupçonné d’immortalité, de posséder des pouvoirs surnaturels ou encore d’être mi-homme mi-dieu susceptible de procurer la richesse, son sacrifice rituel reste commun dans toute l’Afrique noire. Le sort de l'albinos interpelle parce que le mythe s'immisce dans le présent, pour rappeler qu'il s'abreuve toujours à sa source. Il ne s'agit pas en littérature d'un retour à des faits d'un autre âge, mais d'une situation marginalisante encore persistante, d'une manière ou d'une autre: l'irrationnel sur laquelle ces mythes se fondent, et la grande résistance de la société qui y croit mordicus. Il faudra la plume d’un William Sassine ou d’une Eliane Kodjo pour transcender ces croyances. Utilisant les mythes de l'albinos, leurs récits mêlent interrogations et critiques et convoquent la rhétorique nécessaire, y compris l'ironie que manipule parfois bien le personnage albinos, pour démythifier les croyances.

 

 

Le grotesque et la désillusion sociale dans Une part de la honte de Séverin Cécile Abéga

 

Élisabeth Yaoudam

Université de Ngaoundéré

yaoudam_elisabeth@yahoo.fr

 

L’œuvre littéraire en tant que quête de l’écriture et écriture de la quête semble être le lieu où le social côtoie le risible. Ainsi, si certains écrivains ont choisi de dénoncer des problèmes propres à leur milieu de manière plus engagée et parfois brute, d’autres passent par la recherche d’une esthétique toute particulière du risible par exemple pour traduire le désenchantement et la désillusion de ce milieu. Les nouvelles de Séverin Cécile Abéga tirées de son dernier recueil, Une part de honte, semblent bien répondre à cette préoccupation dans la mesure où ils pointent du doigt les tares de la société camerounaise et, par ricochet, celles de l’Afrique de manière grotesque et ironique. Son humour satirique amène parfois le lecteur à rire aux éclats, même si cet humour ironique reste une stratégie scripturale qu’il utilise pour parler de la désillusion sociale. Un tel projet mérite que nous explorions de fond en comble les éléments de l’espace-temps, les personnages et l’intrigue pour comprendre comment Séverin Cécile Abéga bouleverse par le rire un certain conformisme social. Nous nous interrogerons tour à tour sur les stratégies narratives et argumentatives qui organisent la charpente de la fiction de ses nouvelles et qui tournent la parole sociale.

 

 

L’ironie et la question du soi dans la littérature africaine : accompagner la complexité

 

Sévérin Yapo

Université Catholique de Louvain

yapson7@yahoo.fr

 

Ironiser, n’est-ce pas laisser passer l’éphémère en agitation de soi ? Si, dans La carte d’identité, Mélédouman se présente lui-même en lieu et place de la pièce que lui demande l’administrateur, c’est que la problématique de l’ironie en regard d’un monde changeant et qui plus est déchanté, recèle comme enjeu le Soi. Aussi quand Ville cruelle mettra le doigt sur la difformité congénitale de l’« onto-sociologie » africaine, le Silence des déshérités se rira-t-il de l’inadaptation du système d’éducation, tare pour une grande part imputable à ces autorités dont la femme du roi Christophe, dans « sa » Tragédie, dénoncera le manque de lucidité. Christophe lui-même n’ironise-t-il pas lorsqu’en faisant passer de vie à trépas l’un de ses ouvriers endormi, il dit l’aider de la sorte à passer « du petit sommeil au grand » ? De loin plus lucide sera le « fou » de L’aventure ambiguë. Il se refuse à comprendre que Samba Diallo ne sache plus prier après son retour d’Europe. Son geste dénonce le conformisme social, à l’image du héros de Le Mandat, qui se plaît à incarner la naïveté en partageant « son » riz avec toute la communauté là où honnêteté est devenue délit. Cultiver les valeurs qui disent l’humanité en tout peuple, n’est-ce justement pas ce dont témoigne Le cercle des tropiquesqui nie que l’on fasse des drapeaux postcoloniaux un signe de miracle ?

 

 

À mourir de rire. Le silence des Cha-gos et la triste ironie de l’histoire coloniale

 

Antje Ziethen

Université de Toronto

a.ziethen@utoronto.ca

 

En 1966, le Bureau Colonial de Londres envoie une note à la Mission Britannique aux Nations unies. « L’objectif de cet exercice était d’avoir quelques rochers qui resteront notre propriété ; il n’y aura pas de population indigène, à l’exception de mouettes, qui n’ont pas de Comité (le Comité de la Condition Féminine ne couvre pas les droits des oiseaux). Malheureusement, aux côtés des oiseaux, il y a quelques Tarzans et Vendredis, aux origines obscures, qui seront probablement expédiés à Maurice » La cible de cette moquerie sont les Chagossiens, petit peuple ilien de l’Océan Indien déporté entre 1967 et 1973. Avec son troisième roman Le Silence des Chagos, l’écrivaine mauricienne Shenaz Patel est la première à élucider, poétiquement, cette sombre page de l’histoire coloniale et à dénoncer les conséquences dévastatrices qu’ont provoquées ces quelques lignes. Elle démasque le racisme virulent qui s’en dégage et pourfend l’humour dérisoire et déplacé des acteurs coloniaux. De page en page, l’auteur déconstruit le rire du pouvoir, le détourne de sa destination première et, qui plus est, ridiculise ceux qui violent les droits humains à leur avantage. Pourtant, le roman ne suscite pas de rire à grands éclats, mais met à nu la triste ironie du plan d’expulsion. Paradoxalement, la base militaire américaine construite aux Chagos pour assurer la « paix » dans la région de l’Océan Indien convertit les îles paisibles en port de guerre orienté vers l’Afghanistan et l’Iraq. Les Chagossiens sont, quant à eux, transformés de peuple indigène en spectres ambulants, d’enracinés en apatrides. Autre mauvais tour de l’histoire, leur indépendance est déclarée défunte le jour même où celle des Mauriciens est négociée par un pacte avec le diable.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Publié dans Publications récentes

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
M
le thème de l'ironie eu de l'humour parsème l'univers négro-africain de plusieurs manières. généralement, le rire naît de l'incongruité qui existe entre l'intention du discours et son interprétation, il s'agit donc de véritables quiproquos romanesques.
Répondre
G
<br /> Merci pour ce commentaire, toutefois, j'aimerai bien que tu puisses me donner plus de détails dans ta conception de l'ironie dans le roman francophone. Merci<br /> <br /> <br />